Jeunesse

« Un jour, quelqu’un entrera dans ma vie. »

La traversée du temps de Yasutaka Tsutsui

La-traversée-du-temps-Yasutaka-Tsutsui-pegTitre original : Toki wo Kakeru Shoujo
Editions l’école des loisirs
Avril 1992 – 147 Pages
Traduction du japonais par Jean-Christian Bouvier

Quatrième de couverture :

La salle de sciences naturelles ressemblait à un débarras rempli de choses horribles. Et puis soudain, au milieu des ustensiles de cuisine, des squelettes, des collections d’insectes, et des animaux empaillés, Kasuko se sentit envahie par une odeur douce et nostalgique, comme de la lavande. Elle crut voir une ombre, un fantôme, ou un voleur, et s’évanouit.

A partir de ce moment-là, plus rien ne fut normal. Kasuko avait l’impression d’avoir fait un saut dans le temps, de savoir à l’avance ce qui allait se passer. En outre, les catastrophes se succédaient sur son passage, tremblement de terre, incendie, camion fou… Kasuko décida de se confier à quelqu’un de sûr, le gentil Masaru, par exemple, ou le professeur de sciences naturelles. Des discussions qui lui réservent de bien étranges surprises.

Avis personnel :

Après avoir découvert l’anime puis le manga, il était temps de découvrir le récit original ! L’anime a été adapté de ce roman jeunesse. S’il conserve le même schéma pour l’histoire, les personnages ont été changés. Dans l’anime et le manga, l’héroïne Makoto se confie à sa tante Kazuko. Cette dernière est l’héroïne de ce roman-ci.

Le récit est très court. Les chapitres sont nombreux et l’écriture est grosse. Le livre est facilement accessible à des enfants à partir de 8 ans. La narration est destinée à la jeunesse mais le ton n’est pas enfantin pour autant. Elle reste toutefois assez simpliste. Je l’ai par contre parfois trouvée très poétique. L’histoire est bien rythmée, avec beaucoup de péripéties mais aussi des moments plus sereins, propices à des discussions. Les sentiments d’amitié et d’amour sont abordés tout finesse.

Le but de la science étant de ramener à un ordre rationnel l’apparent désordre du monde, la connaissance progresse par paliers successifs, passant de l’inconnu à l’inconnu.

Les personnages ne sont par contre que peu développés mais ils sont très attachants. Kazuko (et non Kasuko comme l’indique la quatrième de couverture) est une jeune fille intrépide, inséparable de ses deux amis Masaru et Goro. Ces derniers sont succinctement décrits pour les besoins de l’histoire mais on arrive facilement à se les représenter. Il y a aussi Monsieur Fukushima, le professeur de sciences naturelles, qui croira Kazuko et l’aidera à comprendre son étrange pouvoir.

En résumé :

Une jolie histoire destinée à la jeunesse. J’ai préféré l’anime, plus adulte, qui livre plus de messages. Mais il est très intéressant de découvrir le récit original.

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Jeunesse

« C’est pas moi, dit-il, c’est monsieur Pinpin. »

Simple de Marie-Aude Murail

Editions L’école des loisirs – 206 Pages
Collection Medium – 2005 – 10,50 €

Quatrième de couverture :

Simple dit  « oh, oh, vilain mot » quand Kléber, son frère, jure et peste. Il dit « j’aime personne, ici » quand il n’aime personne, ici. Il sait compter à toute vitesse : 7, 9, 12, B, mille, cent. Il joue avec des Playmobil, et les beaud’hommes cachés dans les téphélones, les réveils et les feux rouges. Il a trois ans et vingt-deux ans. Vingt-deux d’âge civil. Trois d’âge mental. Kléber, lui, est en terminale, il est très très courageux et très très fatigué de s’occuper de Simple.
Simple a un autre ami que son frère. C’est Monsieur Pinpin, un lapin en peluche. Monsieur Pinpin est son allié, à la vie à la mort. Il va tuer Malicroix, l’institution pour débiles où le père de Simple a voulu l’enfermer, où Simple a failli mourir de chagrin. Monsieur Pinpin, dans ces cas-là, il pète la gueule.
Rien n’est simple, non, dans la vie de Simple et Kléber. Mais le jour où Kléber a l’idée d’habiter en colocation avec des étudiants, trois garçons et une fille, pour sauver Simple de Malicroix, alors là, tout devient compliqué.

Avis personnel :

Kléber est un adolescent de 17 ans qui a choisi de s’occuper de son frère Barnabé dit Simple. Ce dernier est déficient mental ou plutôt i-di-ot comme il le dit lui-même. Leur père avait placé Simple dans un institut spécialisé car il ne souhaitait pas s’occuper de lui dans sa nouvelle vie (remariage) mais le jeune homme avait régressé là-bas. Kléber et Simple sont livrés à eux-mêmes dans Paris mais l’adolescent ne manque pas de ressources. Après quelques péripéties, il parvient à trouver un logement pour son frère et lui : dans une colocation avec quatre autres personnes.

Les personnages sont très nombreux et tous très différents. Même si la vie aux côtés de Simple peut être difficile, il va leur apporter beaucoup. Corentin a de mauvaises habitudes qui vont être modifiées simplement par quelques remarques de Simple. Sa sœur Aria s’attache aussi fortement à Simple mais ce n’est pas le cas pour son petit ami Emmanuel. Celui-ci, étudiant en médecine, ne le considère que comme un handicapé et ne va pas plus loin. Le dernier des colocataires, Enzo, est secrètement amoureux d’Aria. Sous ses airs brusques, il cache un cœur d’or et deviendra ami avec Simple. Il y a aussi monsieur Villedieu qui sous ses airs bourrus de vieux grincheux n’est pas si mauvais que ça.

D’autres personnages ont aussi leur importance comme la famille musulmane de Zahra. Simple y trouvera des amis donc une petite fille sourde-muette. L’un des personnages les plus importants est une peluche : monsieur Pinpin. Il a le droit à la parole au même titre que les autres personnages. C’est lui qui incite souvent Simple à faire des bêtises mais parfois il le raisonne. C’est un compagnon de jeu idéal.

Tout en prenant soin de son frère, Kléber va essayer de vivre sa propre vie mais cela semble parfois impossible. Simple est très attachant ; observateur, il a conscience de nombreuses choses. Ses remarques sont souvent justes et drôles, pleines de naïveté. Mais c’est aussi un handicapé mental qui pose des problèmes et qui invente des jeux qu’il croit réels.

Corentin attrapa sur l’étagère la peluche toute décatie. Simple la prit et la posa devant lui. Une étrange tristesse se lisait sur son visage.
– Pourquoi les gens, ils sont méchants avec monsieur Pinpin ?
Simple avait le don de bouleverser Corentin. Il commença par détourner la tête pour s’essuyer les yeux.
– C’est pas… c’est pas vraiment qu’ils sont méchants. Mais les gens ne comprennent pas trop monsieur Pinpin. Il est … il est trop différent d’eux. Avec ses grandes oreilles et… euh… ses moustaches. Enfin, tu vois, c’est un lapin.
– Un lapin qui parle, l’aida Simple.
– Oui, c’est ça. Les gens, ça les étonne, ça leur fait un peu peur.
Simple soupira :
– C’est compliqué.
– Eh bien, reste Simple. Les gens, on s’en fout.
– Oh, oh, vilain mot.

La plume de Marie-Aude Murail est toujours aussi agréable. Simple mais précise, elle nous émeut avec des personnages très touchants. Les thèmes de l’amour, de l’amitié et de tolérance sont au cœur du roman. Même si le roman est jeunesse avec quelques éléments répétitifs ou éclipsés, cela est attendrissant et peut aussi amener à réfléchir sur l’handicap mental. Le lecteur oscille entre rire et tendresse tout au long du livre.

En résumé :

Un beau roman sur un thème qui n’est pas évident à traiter. Les personnages sont attachants et le style est agréable.

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Jeunesse

« On a fait ce qu’il y a de plus beau au monde, je crois : on a imaginé qu’on allait changer nos vies. »

Demain la révolution de Valérie Zenatti

Editions L’école des loisirs
Collection Maximax
Juin 2008 – 95 Pages
Couverture de Alan Mets

Quatrième de couverture :

Il est arrivé une catastrophe à l’école Jean-Moulin.
Une, ou plutôt deux.
D’abord, la directrice bien-aimée de tous, madame Mervent, a fait une mauvaise chute dans l’escalier. Les pompiers sont venus pour l’emmener d’urgence à l’hôpital. Elle est dans le coma.
Ensuite, son remplaçant est arrivé. Il n’est bien-aimé de personne, car il passe son temps à regarder tout le monde d’un air cruel et à distribuer des punitions et des brimades, à ceux qui parlent, à ceux qui crient, à ceux qui courent, et même à ceux qui ont juste l’air heureux. Bref, c’est un tyran. Barbara, Arthur, Paul, Victor et Louise le surnomment très vite l’Ogre des écoles. Mais un surnom, même bien trouvé, ne suffit pas.
Changer la vie, se débarrasser d’un tyran, ça s’appelle faire la révolution. Il faut donc commencer par se documenter sur les révolutions du passé pour bien préparer celle de l’avenir et la réussir. Le problème, c’est que quand on tape « Révolution » sur internet, le moteur de recherche annonce 523684 réponses correspondantes. Laquelle choisir ???

Avis personnel :

Dès les premières pages, le lecteur est tout de suite plongé dans l’histoire. Madame Mervent, la directrice de l’école Jean-Moulin, fait une chute dans l’escalier. Elle est remplacée par Monsieur Geld qui tyrannise les élèves autant que leurs professeurs. Tout est interdit, le silence a remplacé les éclats de rire à la récréation, les élèves viennent à l’école la peur au ventre, les maîtresses ont les larmes aux yeux…il faut que cela cesse ! Les deux premiers chapitres servent à présenter le cadre de l’école et la situation avant que le sujet du livre intervienne : la révolution. La parole est donnée aux enfants tout au long du roman, il y a peu d’intervenants adultes. Les parents ne comprennent d’ailleurs jamais la situation tendue existante à l’école.

Un groupe d’élèves du CM2 va se réunir en secret et établir un plan pour se débarrasser de l’Ogre des écoles. Les enfants mènent des recherches et commencent par d’abord déterminer ce qu’est une révolution. Quantité de définitions y correspondent mais ils finissent par trouver celle dont ils ont besoin : pas de violence mais clamer haut et fort ce qu’ils veulent. Ils se posent des questions sur ce qu’ils souhaitent exactement et sur comment l’obtenir. Cela amènera aussi le (jeune) lecteur à réfléchir dessus. Une fois décidés sur le plan à suivre, les enfants vont travailler à son exécution (pas couper la tête du directeur hein) pendant plusieurs semaines.

Une réflexion de Paul sur la Révolution :

Pourtant, je ne pense pas qu’on puisse dire que les révolutionnaires ont perdu. Ils ont fait avancer le monde, l’ont rendu meilleur, ou un petit peu moins injuste, en tout cas.

Les élèves sont de plus en plus nombreux mais le groupe initial est composé de huit membres : Enza, Juliette, Victor, Geoffroy, Paul, Arthur, Tom et Barbara. Ils sont tout de même beaucoup et il y a peu de pages ce qui fait qu’on peut parfois les confondre. Chacun possède une qualité propre qu’il va mettre au service du Club révolutionnaire de l’école Jean-Moulin dit CRDEJM. Quelques personnages sortent néanmoins du lot. Il y a Victor, très timide à l’école, mais qui apporte au club de solides connaissances sur la Révolution. Il y a Geoffroy, l’instigateur du club, qui a réunit tout le monde et coordonne les différentes tâches. Il y a aussi Paul, garçon responsable que la narratrice admire. Et finalement cette dernière, dénommée Barbara, qui fera preuve de beaucoup de courage. C’est elle qui nous raconte l’histoire mais son point de vue n’est pas clos sur elle-même.

Une amitié forte s‘établit entre tous ces enfants grâce à cette aventure qu’ils vivent ensemble. Les élèves sont curieux, inventifs et déterminés à réussir. Ils construisent pas à pas la révolte jusqu’à la bataille finale. Ils ont parfois peur des conséquences mais ils sont prêts à tout pour aller jusqu’au bout : ils se battent pour leur liberté. Ce livre est aussi un témoignage de solidarité : personne n’est abandonné.

Un Monsieur à un journaliste :

« Je suis là pour qu’on me respecte, même si je ne gagne que mille euros par mois. Depuis des siècles, des hommes et des femmes se battent pour être respectés, pour que chacun puisse vivre comme un être humain. C’est un combat qui ne doit jamais cesser. »

En résumé :

Un roman vibrant de messages pour la liberté et la solidarité.

Challenge : Lecture & Liberté

Jeunesse

« Un salon de coiffure, question moralité, on peut trouver mieux. »

Maïté Coiffure de Marie-Aude Murail

Editions L’école des loisirs
Collection Medium – 178 Pages
Juin 2007 – 9,50 €

Quatrième de couverture :

Louis Feyrières doit faire un stage d’une semaine, comme tous les élèves de troisième. Où ? Il n’en sait rien. Ce qui est sûr, c’est qu’il n’aime pas l’école et qu’il ne se sent bon à rien.
« J’ai ma coiffeuse qui prend des apprentis, dit Bonne-Maman, lors d’un repas de famille. Stagiaire, c’est presque pareil. »
Coiffeur ? C’est pour les ratés, les analphabètes, décrète M. Feyrières qui, lui, est chirurgien. Louis se tait. Souvent. Mais il observe. Tout le temps. Comme il n’a rien trouvé d’autre, il entre comme stagiaire chez Maïté Coiffure. Et le voilà qui se découvre ponctuel, travailleur, entreprenant, doué !
L’atmosphère de fièvre joyeuse, les conversations avec les clientes, les odeurs des laques et des colorants, le carillon de la porte, les petits soucis et les grands drames de Mme Maïté, Fifi, Clara et Garance, tout l’attire au salon. Il s’y sent bien, chez lui.
Dès le deuxième jour, Louis sait qu’il aura envie de rester plus d’une semaine chez Maïté Coiffure. Même si son père s’y oppose.

Avis personnel :

Ce livre de Marie-Aude Murail est encore une relecture et c’est toujours aussi plaisant. Le héros de cette histoire est un jeune garçon de troisième prénommé Louis. Il est plutôt timide, n’aime pas l’école et n’a que peu d’amis. Il effectue ce stage un peu par dépit, se moquant un peu de tout. Mais peu à peu la curiosité le pique. Il découvre un nouvel univers, une passion pour laquelle il est doué lui qui est sans cesse critiqué.

Les personnages de ce roman ont tous leurs propres soucis, on en sait parfois très peu sur eux mais suffisamment pour s’y attacher. L’univers du salon de coiffure est composé de personnages hétéroclites. Mme Maïté est une vieille femme n’ayant plus la joie de vivre, affectée par la perte de proches. Elle ne vit plus que pour son salon de coiffure et quelques instants de joie grâce à ses employés mais elle reste plongée dans la solitude. Clara est une jeune femme maltraitée par son copain qui a du mal à se sortir de cette situation. Fifi est jeune homme drôle, généreux mais qui cache lui aussi une blessure. Son histoire avec Manfred est rapidement abordée. J’ai particulièrement aimé le passage fort où il va enfin commencer à vivre. Un roman centré sur lui m’aurait plu mais comme ce n’est pas le personnage principal, il reste en retrait par rapport à Louis. Garance, l’apprentie, est une jeune fille qui n’aime pas étudier et a choisit la coiffure parce qu’elle ne savait pas quoi faire d’autre. Mais elle n’a pas réellement envie d’y être, arrive en retard, souhaite s’en échapper le plus tôt possible pour aller s’amuser. Le lecteur apprend à connaître brièvement ces personnages avec quelques morceaux de leur vie.

La famille de Louis est composée d’un père très autoritaire qui considère que les études sont ce qu’il y a de plus important. Les apparences sont très importantes pour lui. La citation du début de cette chronique est évidemment de lui. Sa femme, plutôt soumise, va peu à peu se réveiller et exprimer sa propre opinion. Louis a une jeune sœur, Floriane, ayant toute la fraîcheur et l’innocence de l’enfance. Et il y aussi Bonne-Maman, la grand-mère adorable. Louis devra affronter son père s’il souhaite faire de la coiffure son métier.

Les problèmes de l’orientation et de l’échec scolaire sont au cœur du roman. D’autres thèmes sont abordés tels que l’intolérance et les préjugés. M. Feyrières est un exemple type de l’homme qui a réussi et qui regarde le reste de la société comme un déchet. Marie-Aude Murail aborde ces questions avec simplicité et justesse. De plus, l’humour reste très présent. Le quotidien est décrit avec ses soucis et ses joies. J’ai aussi aimé la fin de ce roman qui est plutôt originale. Il ne s’agit pas d’une simple ouverture sur l’avenir mais en quelques mots, il est écrit ce que va devenir Louis ainsi que les autres personnages du roman.

En résumé :

Un roman très touchant sur le choix de son avenir.

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