Epistolaire

« Je me sens éternel. »

Pas raccord de Stephen Chbosky

Titre original : The Perks of being a Wallflower
Editions Sarbacane – 296 Pages
Collection Exprim’
1999 (VO) – 2008 (VF) – 10,50 €
Traduction de Blandine Longre

Quatrième de couverture :

Au lycée où il vient d’entrer, on trouve Charlie bizarre. Trop sensible, pas « raccord ». Pour son prof de Lettres, c’est sans doute un prodige ; pour les autres c’est juste un « freak ». En attendant, il reste en marge – jusqu’au jour où deux terminales, Patrick et la jolie Sam, le prennent sous leur aile. La musique, le sexe, les fêtes : le voilà entré dans la danse…et tout s’accélère.

Avis personnel :

The Perks of being a Wallflower est un livre culte aux Etats-Unis où il a été réédité plus de vingt fois. J’en ai eu connaissance par l’adaptation cinématographique qui sort prochainement avec Logan Lerman dans le rôle de Charlie et d’Emma Watson dans celui de Sam. C’est Stephen Chbosky lui-même qui a rédigé le scénario et réalisé le film. Ce roman est inoubliable, une véritable pépite auquel on repensera encore longtemps après l’avoir lu. Il n’est pas innovant, abordant des thèmes adolescents déjà traités mais cela est fait de telle manière que l’on ne peut pas s’empêcher d’y adhérer.

Le roman est épistolaire mais les lettres sont seulement écrites par le héros. Il s’adresse à quelqu’un qui peut le comprendre mais qu’il ne connaît pas (tout comme le destinataire ne le connait pas). L’écriture apparaît comme spontanée. Si au début le style se rapproche de l’oralité, il s’améliore par la suite en même temps que Charlie améliore ses qualités rédactionnelles. Beaucoup de thèmes sont abordés et sont en rapport avec la construction de soi. L’amour, l’amitié, la sexualité et la scolarité sont bien entendu au premier plan. Mais d’autres thèmes plus sombres traités tels que la drogue, le viol, l’alcool, le suicide, l’homosexualité…

Il faut d’abord que tu saches que je suis à la fois triste et heureux, et que j’ai toujours pas compris comment ça se fait.

Ce qui rend ce roman si touchant, c’est Charlie. Elève brillant mais solitaire, il n’est pas comme les autres. Agé de 15 ans, il semble parfois ne pas connaître grand chose de la vie. Il a des difficultés à se sociabiliser mais il aura un jour le courage de se rapprocher de Sam et Patrick. Mais même avec eux, il ne sera jamais réellement lui-même. Il ne sait pas vivre ni participer. Très passif, il fait parfois preuve d’une agressivité incontrôlable qui ne dure que quelques instants. Il se retranche dans son monde à lui et se questionne énormément. Il a des réflexions très justes, que ce soit sur la vie ou sur les autres, mais il ne parvient pas à s’impliquer. Il a une vision du monde qui lui est propre. C’est un adolescent qui aime lire et observer le monde qui l’entoure. Il est très émotif, on le trouve même bizarre mais il est en réalité malade. Il voit un psychologue qui tente de l’aider à percer ce secret qu’il garde caché au plus profond de lui. Il n’en demeure pas moins un adolescent exceptionnel qui sera aidé par Bill, son professeur de littérature, et Sam et Patrick, ses plus proches amis, à s’accepter.

Et ensuite, il dit un truc du genre : « Je serais prêt à mourir pour toi. Mais je refuse de vivre pour toi. » [Charlie parle d’un personnage de La source vive de Ayn Rand.]
Un truc comme ça. Je crois que l’idée, c’est que chacun doit d’abord vivre pour lui-même et ensuite faire le choix de partager sa vie avec d’autres gens. C’est peut-être ça qui fait que les gens « s’impliquent ». J’en suis pas trop sûr. Parce que je sais pas si ça me dérangerait de vivre pour Sam pendant un certain temps. De toute façon, elle voudrait pas, et peut-être qu’en fin de compte, c’est beaucoup mieux, d’être amis comme ça. En tout cas, c’est ce que j’espère.

Le roman est ponctué de nombreuses références littéraires et musicales. Bill fait découvrir à Charlie des auteurs et des livres et il l’invite à réfléchir dessus. En ce qui concerne la musique, le héros se retrouve dans de nombreuses chansons. Il est aussi fait mention du film The Rocky Horror Picture Show, réalisé et scénarisé par Richard O’Brien et Jim Sharman en 1975. Aujourd’hui encore, comme dans le roman, pendant des projections, des spectateurs interprètent les personnages du film. C’est un vrai moment de partage.

– Charlie a trouvé sa place.
Et Bob a hoché la tête pour de bon. Et tout le monde a hoché la tête. Et j’ai commencé à me sentir tendu, façon Bob. Mais Patrick m’a pas laissé le temps d’être trop tendu. Il s’est assis à côté de moi.
– Tu vois des choses. T’en parles pas. Et tu comprends.

A travers ses lettres, Charlie nous fait part de son quotidien. Cela commence par sa rentrée scolaire au lycée puis tout ce qu’il découvre grâce à Sam et Patrick. Il nous livre sa vie en toute sincérité, aussi bien quand il est triste que quand il est heureux. Il partage aussi ses souvenirs, quels qu’ils soient. Ce roman est porteur de messages mais surtout d’espoir.

En résumé :

Un roman inoubliable sur le mal-être adolescent mais qui livre de nombreux messages d’espoir.

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Liste de livres de Charlie :

To Kill a Mockingbird by Harper Lee
This Side of Paradise by F. Scott Fitzgerald
A Separate Peace by John Knowles
Peter Pan by J. M. Barrie
The Great Gatsby by F. Scott Fitzgerald
The Catcher in the Rye by J. D. Salinger
On the Road by Jack Kerouac
Naked Lunch by William S. Burroughs
Walden by Henry David Thoreau
Hamlet by William Shakespeare
The Stranger by Albert Camus
The Fountainhead by Ayn Rand

Extraits :

Tout ce que j’aimerais, c’est que Dieu ou mes parents ou Sam ou ma sœur ou n’importe qui d’autre me disent simplement pourquoi je suis pas « raccord ». Qu’ils m’expliquent ce qui tourne pas rond chez moi. Qu’on me dise juste comment être différent d’une façon qui soit logique. Comment faire partir tout ça. Le faire disparaître. Je sais que c’est pas une bonne idée : c’est mon problème à moi et je sais qu’avant d’aller mieux, les choses sont toujours pires (comme dit mon psy), mais là c’est trop de pire à supporter.

Sam à Charlie :

– Bref, demain, je m’en vais. Et j’ai décidé que ça se passerait plus jamais comme ça, avec personne. J’ai décidé de faire ce que j’ai envie de faire. J’ai décidé d’être la personne que je suis vraiment. Et je vais essayer de trouver cette personne. Mais pour l’instant, je suis là, avec toi. Et je veux savoir où toi tu en es, de quoi tu as besoin, ce que tu as envie de faire.

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Epistolaire

Ne t’inquiète pas pour moi de Alice Kuipers

Ne t’inquiète pas pour moi de Alice Kuipers

Titre original : Life on the refrigerator door
Editions Albin Michel – 242 Pages
Traduction par Valérie Le Plouhinec

Quatrième de couverture :

Bonne chance pour ton contrôle aujourd’hui, ma chérie.
Désolée de ne pas être là pour le petit dej’.
La cage de Jeannot a besoin d’être nettoyée.
A ce soir.
Bises,
Maman.
P.-S. : N’oublie pas ta clé !

Une correspondance par Post-it sur le frigo entre une mère et sa fille.
Lorsque la mère tombe malade, le temps presse mais l’espoir demeure.
Un livre comme un trésor qui chuchote à l’oreille l’importance de ceux qu’on aime…

Avis personnel :

Voici un roman très court, se lisant d’une seule traite, quarante minutes environ pour ma part. Je l’avais lu il y a quelques années mais je l’ai redécouvert avec plaisir. J’aime beaucoup la présente édition. Les tons pâles de la couverture s’accordent avec la tristesse de l’histoire. Le dessin d’un lapin, illustrant le Jeannot Lapin du récit, est très simple et donne une impression de douceur. Celle-ci est renforcée par le texte écrit en rose, sans majuscule. Le livre présente cinq chapitres. Chaque titre est surmonté d’un petit lapin esquissé, faisant une cabriole ou bien confiant un secret.

Les cinq chapitres ne sont pas de longueur égale mais sont séparés en mois. Chacun est accompagné par une petite phrase tirée d’un poème que Claire a créé pour sa mère. Cela donne :
– Janvier : Quand je te regarde
– Mars : Je vois la femme que je veux être
– Juin : Forte et courageuse
– Septembre : Belle et libre
– P.-S. : Je t’aime

A travers des Post-it s’étale la relation entre Claire et sa mère. Ce moyen d’expression est certes original mais possède beaucoup d’inconvénients. Le fil de l’histoire est logique mais il y a de nombreuses choses éclipsées. Parfois, le lecteur n’a même pas la réponse à une question puisque le Post-it existe mais n’a pas été partagé. De plus, il y a très peu de profondeur. Par ce manque de contact, tout paraît un peu froid. On parvient tout de même à suivre leur vie. Claire est une lycéenne tandis que sa mère est médecin à l’hôpital. Elle s’occupe d’enfants, essentiellement des bébés. Finissant très tard, ayant des gardes le week-end, elle ne voit pas souvent sa fille. Cette famille est composée d’un autre membre : Jeannot Lapin, souvent mentionné par sa cage à nettoyer ou les carottes à lui acheter. Il y a aussi le groupe d’amis de Claire, celui de sa mère ainsi que le père de Claire, peu présent car ses parents ont divorcés. La vie est loin d’être parfaite mais ils sont heureux. La maladie va malheureusement s’immiscer dans leur quotidien et plus rien ne sera jamais comme avant.

Le sujet abordé est grave mais pourtant, Claire et sa mère continuent leur vie en n’en parlant quasiment pas. Le manque de profondeur, outre par le biais des Post-it, se fait aussi ressentir par ce vide dans les discussions. Une liste de courses ou informer que quelqu’un a appelé semblent être déplacés. Leur quotidien est ainsi listé et la nouvelle de la maladie de la mère de Claire s’apprend de la même manière. Toutefois, le récit reste très triste et on parvient à ressentir cette émotion. De l’espoir subsiste, parfois à peine perceptible, et d’autres fois éclatant. J’apprécie la fin et les sentiments confiants qu’elle inspire. Alice Kuipers a su trouver les mots justes pour transmettre de nombreuses émotions.

En résumé :

Un court roman qui malgré son manque de profondeur est rempli de sentiments. On ne peut s’empêcher de verser une larme face au combat de Claire et de sa mère.

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Extrait :

J’aurais voulu t’empêcher à jamais de voir que le monde peut être mauvais, que la vie est difficile, que parfois on ne contrôle pas son destin.

Epistolaire

Quand souffle le vent du nord de Daniel Glattauer

Quand souffle le vent du nord de Daniel Glattauer

Editions Le Livre de Poche – 348 Pages
Traduction par Anne-Sophie Anglaret

Quatrième de couverture :

Un homme et une femme.
Ils ne se connaissent pas mais échangent des mails. Jusqu’à devenir accros. Jusqu’à ne plus pouvoir se passer l’un de l’autre, sans se rencontrer pour autant…
Savoureuse et captivante, cette comédie de mœurs explore avec finesse et humour la naissance du sentiment amoureux.

Avis personnel :

Quand souffle le vent du nord est un titre qui a fait parler de lui dernièrement sur la blogosphère ! J’étais très curieuse de le découvrir et je remercie Babelio qui l’a proposé dans le cadre de son opération de Masse Critique ainsi que l’éditeur Le Livre de Poche.

La première chose qui m’avait attiré dans ce livre était le titre. Je le trouve très poétique et il correspond bien à l’ambiance du roman. Il est traduit de l’allemand Gut gegen Nordwind. La quatrième de couverture résume bien l’intrigue. Tout au long du roman, le lecteur se demande si les deux protagonistes vont se rencontrer et si cela sera la fin de leur histoire.

Le roman est uniquement composé de mails, plus ou moins longs mais ceux-ci tiennent généralement sur une page. On est directement embarqué dans une succession rapide de ces mails. On vit en même temps qu’eux leur histoire et c’est un des points forts de ce livre. Lorsque quelques jours se passent entre les mails, on est impatient de connaître la suite. Et lorsque quelques secondes séparent deux mails, on est tellement plongé dans l’histoire qu’on trépigne d’impatience en attendant les mails. Une seule date est donnée, au début du roman, lorsque la correspondance commence. Par la suite, seules des indications de jours, heures, minutes ou secondes sont précisées. Cela crée un espace où le monde extérieur est oublié, rendu encore plus intime par un échange entre deux personnages.

J’ai commencé ce livre avec des espoirs assez hauts vu les critiques élogieuses que j’avais lues. Je m’attendais à quelque chose rempli d’émotion et j’ai été un peu déçue. Cela reste tout de même une lecture très agréable que je ne regrette pas. Le problème essentiel et non des moindres est que je n’ai pas réussi à m’attacher aux personnages. Ce qui est fatidique pour un roman épistolaire entre deux personnages reliés par une histoire d’amour. De plus, leur relation est assez malsaine. Emmi est « mariée et heureuse » comme elle le dit elle-même mais ne vit plus qu’à travers les mails de Leo. Emmi est agaçante, à toujours vouloir tout contrôler. Leo m’a davantage plu, il est plus réfléchi et sensible.

Nous suivons Leo et Emmi au fil de leurs discussions. Ils apprennent à se connaître en même temps que nous les découvrons. Si au début il s’agit d’échanges sarcastiques, la conversation devient rapidement plus tendre. Ils ne peuvent plus se passer l’un de l’autre mais ne se connaissent pourtant pas. Ils ont une image idéalisée de l’autre et ont peur d’être déçus s’ils se rencontrent enfin. Ils repoussent inévitablement cette rencontre qui sera la fin de leur échange épistolaire. Ils ne veulent pas se perdre.

J’ai été surprise par la fin. Je ne m’attendais pas du tout à ça. J’avoue avoir été déçue en la lisant mais en y repensant, elle va parfaitement à la relation qu’entretient Leo et Emmi. L’auteur n’avait pas pensé écrire de suite mais des lecteurs ont réagi, n’acceptant pas cette fin-ci. Bien que ce roman me laisse un avis mitigé, je lirai la suite nommée La septième vague.

C’est un roman vibrant d’émotions. Que l’on s’attache ou non aux personnages, leur caractère se fait ressentir à travers leurs mails. Le style de l’auteur est aussi très agréable. Le vocabulaire est généralement courant mais quelques mails sont vraiment superbes, très touchants.

En résumé :

Un livre très agréable, avec beaucoup de sentiments.

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Epistolaire

Un homme à distance de Katherine Pancol

Un homme à distance de Katherine Pancol

Editions Le Livre de Poche – 460 Pages

Quatrième de couverture :

Ceci est l’histoire de Kay Bartholdi, un roman par lettres comme on en écrivait au XVIIIe siècle.
Un inconnu écrit à Kay, libraire à Fécamp, pour lui commander des livres. Au fil des lettres, le ton devient moins officiel, plus inquisiteur, plus tendre aussi. Kay et Jonathan parlent de leurs lectures, certes, mais entament un vrai dialogue amoureux. Ils se font des scènes, des confidences, s’engagent dans une relation que Kay, hantée par le souvenir d’une déchirure ancienne, s’efforce de repousser…

Pour découvrir Katherine Pancol, vous pouvez consulter son site.

Avis personnel :

Un roman court, trop court même. Il s’agit d’un roman épistolaire, c’est-à-dire un échange de lettres. Seuls le prologue et l’épilogue ne sont pas des lettres dans ce livre.

La situation est présentée rapidement en deux pages par un personnage extérieur à l’histoire. Il sera cité dans les lettres des deux protagonistes mais ce n’est pas lui qui fait l’histoire, il la raconte. Et cette histoire, qu’est-elle ? Elle nous est présentée ainsi :

L’histoire d’un amour haut comme une cathédrale, violent comme une bordée de pirates, avec des chants, des confessions, de l’encens, des abordages, des orages, des prises d’otages. Beaucoup de ferveur. Beaucoup de souffrance aussi.
On l’oublie trop, maintenant. La souffrance peut être magnifique…
Magnifique…

Kay et Jonathan entretiennent une correspondance où ils se dévoilent véritablement, comme on ne se dévoilerait pas dans un échange professionnel entre deux inconnus. Les premières lettres sont un peu surréalistes de ce côté-ci mais les nombreuses citations d’auteurs et leur goût partagé pour la littérature nous font oublier cela. Leur histoire est dévoilée petit à petit jusqu’à ce que tout se précipite vers la fin du roman. Je ne m’attendais pas du tout à un tel dénouement et il parfait.

Katherine Pancol sait peindre les sentiments et faire ressentir des émotions. Ses personnages sont créés et décrits avec justesse.

Les nombreuses citations sont toutes plus superbes les unes que les autres et servent pleinement le roman. J’avoue avoir eu un faible pour celles d’Emily Dickinson. En voici une :

Attendre une heure est long
Si l’amour est en vue
Attendre l’éternité est bref
Si l’amour est au bout.

En résumé :

Un joli livre peignant les émotions des personnages avec brio.

Pour découvrir ou si vous aimez le genre épistolaire, je vous conseille un grand classique : Les liaisons dangereuses de Pierre Choderlos de Laclos. Tout simplement merveilleux.

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