Classiques

La peste de Albert Camus

La peste de Albert Camus

Editions Folio – 278 Pages

Quatrième de couverture :

– Naturellement, vous savez ce que c’est, Rieux ?
– J’attends le résultat des analyses.
– Moi, je le sais. Et je n’ai pas besoin d’analyses. J’ai fait une partie de ma carrière en Chine, et j’ai vu quelques cas à Paris, il y a une vingtaine d’années. Seulement, on n’a pas osé leur donner un nom, sur le moment… Et puis, comme disait un confrère : « C’est impossible, tout le monde sait qu’elle a disparu de l’Occident. » Oui, tout le monde le savait, sauf les morts. Allons, Rieux, vous savez aussi bien que moi ce que c’est…
– Oui, Castel, dit-il, c’est à peine croyable. Mais il semble bien que ce soit la peste.

Avis personnel :

Par où commencer ? Ce livre me laisse un sentiment difficile à transcrire. Pas qu’il m’ait déplu, loin de là, mais il est difficile à définir. Je n’ai pas pu le lire d’une traite et j’ai donc espacé la lecture sur une dizaine de jours. J’ai eu un peu de mal à accrocher au début puis petit à petit, je me suis attachée aux personnages. La lecture n’a pas été plus facile mais j’ai laissé passer moins de temps, ayant lu les deux dernières parties en l’espace de deux jours. Le livre se compose de cinq parties, plus ou moins longues, avec différents chapitres non numérotés. Il se compose sous la forme d’une chronique ce qui est certainement une des raisons pour laquelle on a du mal à accrocher dès le départ. Comme cela est justifié à la fin du livre, la forme de la chronique a été choisie pour pouvoir retracer les événements et être le plus objectif possible. C’est pour cela qu’une certaine retenue est présente tout au long du roman avec toutefois de nombreux passages où les personnages se dévoilent plus en détail, surtout après la première partie du roman. Le narrateur est un des personnages clés du roman, je préfère ne pas dévoiler son identité, vous le saurez par vous-même à la fin du livre et pourrez ainsi mener l’enquête !
Les premières lignes du roman sont les suivantes :

Les curieux événements qui font le sujet de cette chronique se sont produits en 194., à Oran.

Une phrase simple, annonçant tout de suite le sujet. La date exacte n’est pas précisée mais dans les années 1940, on peut penser à la guerre qui a fait des millions de victimes. Le sujet principal du livre n’est pas la guerre (même si on peut penser que la peste est une allégorie de la Seconde Guerre Mondiale avec la Résistance et les camps de concentration), mais celle-ci est présente en filigrane tout au long du roman et c’est un élément important  à prendre en compte. Je pense que ce que Camus a voulu faire passer est un message aux hommes.

Au milieu des cris qui redoublaient de force et de durée, qui se répercutaient longuement jusqu’au pied de la terrasse, à mesure que les gerbes multicolores s’élevaient plus nombreuses dans le ciel, le [narrateur] décida alors de rédiger le récit qui s’achève ici, pour ne pas être de ceux qui se taisent, pour témoigner en faveur de ces pestiférés, pour laisser du moins un souvenir de l’injustice et de la violence qui leur avaient été faites, et pour dire simplement ce qu’on apprend au milieu des fléaux, qu’il y a dans les hommes plus de choses à admirer que de choses à mépriser.

Le roman est parcouru de nombreuses réflexions philosophiques qui je pense sont essentielles au récit, lui donnant toute sa grandeur. Je vous laisserai les découvrir par vous-même en lisant ce roman mais les thèmes de l’amour, de l’amitié, de la guerre, de la solidarité ainsi que d’autres sont évoqués.

Quant aux personnages, il y en a toute une galerie dans ce roman. Tellement qu’on peut s’y perdre. Un personnage apparaît, est nommé et quelques caractéristiques sur lui sont donnés. Mais il peut ne pas réapparaître avant une centaine de pages et si on espace la lecture, on peut ne pas se souvenir réellement de qui il s’agit. Malgré cet inconvénient, il y a tout de même quelques personnages principaux. Il est un peu difficile de définir la limite entre protagonistes et personnages secondaires pour certains personnages car ils ont aussi un rôle important à jouer mais ne sont que rarement cités. Le Docteur Rieux, peut apparaître comme insensible, mais il fait tout ce qui est en son pouvoir pour soigner ses concitoyens et au fil de ses discours avec ses amis dont Tarrou, on peut découvrir qui il est réellement. Ce Tarrou est un personnage tenant des carnets dans lequel le narrateur puisera pour écrire cette chronique. De la même manière, au contact des autres, ce personnage se dévoilera plus en détails. On peut aussi citer Rambert, ce journaliste qui n’appartient pas à la ville et s’y sent étranger. Il cherche à tout prix à fuir mais finalement, il a partagé cette expérience de la peste et il est comme tous ces hommes enfermés. Il y a aussi Cottard, personnage peu enclin au respect des lois, mais qui aide tout de même les héros. Et finalement, on peut citer Grand, ce personnage timide, peu sûr de lui, qui cherche LA phrase et qui pourtant abat un travail énorme. Le narrateur le propose d’ailleurs comme héros.

Oui, s’il est vrai que les hommes tiennent à se proposer des exemples et des modèles qu’ils appellent héros, et s’il faut absolument qu’il y en ait un dans cette histoire, le narrateur propose justement ce héros [Grand] insignifiant et effacé qui n’avait pour lui qu’un peu de bonté au cœur et un idéal apparemment ridicule. Cela donnera à la vérité ce qui lui revient, à l’addition de deux et deux son total de quatre, et à l’héroïsme la place secondaire qui doit être la sienne, juste après, et jamais avant, l’exigence généreuse du bonheur.

Le personnage secondaire que je ne peux m’empêcher de citer est la mère de Rieux qui s’inquiète pour son fils et ses amis, et qui possède un regard bienveillant.

Voilà pour cette critique, pas réellement de résumé mais plutôt quelques détails qui j’espère vous auront donner envie de lire ce superbe roman !

Extraits :

Il est difficile de choisir des extraits tellement il y en a que j’ai apprécié. En voici quelques uns supplémentaires en plus des précédents distillés dans ma critique.

Partie II :

Mais le narrateur est plutôt tenté de croire qu’en donnant trop d’importance aux belles actions, on rend finalement un hommage indirect et puissant au mal. Car on laisse supposer alors que ces belles actions n’ont tant de prix que parce qu’elles sont rares et que la méchanceté et l’indifférence sont des moteurs bien plus fréquents dans les actions des hommes. C’est là une idée que le narrateur ne partage pas.

Partie II :

Certains d’entre nous, cependant, s’obstinaient à écrire et imaginaient sans trêve, pour correspondre avec l’extérieur, des combinaisons qui finissaient toujours par s’avérer illusoires. Quand même quelques-uns des moyens que nous avions imaginés réussissaient, nous n’en savions rien, ne recevant pas de réponse. Pendant des semaines, nous fûmes réduits alors à recommencer, sans cesse la même lettre, à recopier les mêmes appels, si bien qu’au bout d’un certain temps, les mots qui d’abord étaient sortis tout saignants de notre cœur se vidaient de leur sens. Nous les recopiions alors machinalement, essayant de donner au moyen de ces phrases mortes des signes de notre vie difficile. Et pour finir, à ce monologue stérile et entêté, à cette conversion aride avec un mur, l’appel conventionnel du télégramme nous paraissait préférable.

Partie V :

Toujours silencieuses dans la journée, les rues étaient envahies, le soir, par la même foule où dominaient seulement les pardessus et les écharpes. Les cinémas et les cafés faisaient les mêmes affaires. Mais, à regarder de plus près, on pouvait remarquer que les visages étaient plus détendus et qu’ils souriaient parfois. Et c’était alors l’occasion de constater que, jusqu’ici, personne ne souriait dans les rues. En réalité, dans le voile opaque qui, depuis des mois, entourait la ville, une déchirure venait de se faire et, tous les lundis, chacun pouvait constater, par les nouvelles de la radio, que la déchirure s’agrandissait et qu’enfin il était permis de respirer.

En résumé :

Un pur chef-d’œuvre qu’il faut absolument avoir lu. Même si le début peut paraître difficile, surtout, il faut persévérer dans la lecture.

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6 réflexions au sujet de “La peste de Albert Camus”

  1. Je me rappelle avoir lu ce livre quand j’étais en seconde (et là, je prends un coup de vieux). Je ne me rappelle pas de l' »histoire », mais de mes sentiments au cours de la lecture.
    On avait dû faire une « fiche de lecture » sur un livre de Camus parmi 3 titres. Naturellement, on était deux « courageuses » à ne pas avoir choisi « L’étranger » (plus court)… Je n’ai pas regretté mon choix (et la prof’ non plus) 😀

    Il faudrait que je le relise maintenant que j’ai (un peu) vieilli ^^

    1. Je n’avais jamais lu du Camus et je n’ai pas du tout été déçue.
      J’ai entendu des critiques différentes sur l’Etranger, je le lirai un jour et je verrai bien par moi-même. ^_^
      Il y a tellement de livres que j’aimerais relire mais j’en ai tellement d’autres à découvrir !

  2. J’avais lu ce livre quand j’étais en quatrième (lecture imposée). Je souviens vaguement de l’histoire, mais ce que je me souviens le plus, c’est que j’ai eu beaucoup de mal à lire le livre que j’ai trouvé vraiment trop long, trop de descriptions. Après j’étais peut être trop jeune pour cette lecture mais du coup, je n’ai jamais été tentée de lire un autre livre de Camus. Un jour peut être!

    1. Oui, il y a beaucoup de descriptions et les sentiments sont peu présents puisque comme c’est expliqué en fin de roman, il s’agissait de faire une compte-rendu des événements survenus. Après, les émotions transparaissent tout de même mais elles sont bien moins présentes que les descriptions. Toutefois, celles-ci sont aussi imprégnées de réflexions philosophiques.
      Mais comme tu l’as dit, je pense que la quatrième est un peu trop trop jeune pour lire ce roman. Il y a trop de lectures imposées à un âge où ça peut tout gâcher. ;x

  3. C’est le seul livre de Camus que j’ai lu. Je l’ai lu dans le cadre d’un cours au lycée. J’ai apprécié ce roman, mais je l’ai encore plus aimé grâce aux commentaires de ma professeur de francais de l’époque qui a mis à jour l’allégorie de ce roman.

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